Hebron, ville sous tension- Piscine a Bethleem
Lundi 19 juillet
Lever comme d'hab vers 8h, sous un puissant soleil qui succede a la fraicheur nocturne et frappe fort des les premiers rayons. Sur la photo, CL qui gratte quelques minutes de sommeil, protege par l'ombre de la parabole.
Camp d'ete a 8h30.
E et moi filons a Bethleem avec Nael, un des animateurs palestiniens qui parle francais, pour une mission barbier-internet, avant de partir pour Hebron.
Taxi-bus rapide jusqu'au centre-ville et retour a l'Afteen pour engloutir quelques falafels/humus/coca. On quitte Nael devant le barbier et passons chacun notre tour sur le siege confortable. Je commence avec une commande simple, la barbe et la boule a 0. Je me laisse aller au soin complet avec la coupe de poils du visage au fil a coudre racle contre la peau (ca arrache!!), shampooing tres utile qui mouille plus ma chemise que mon crane d'oeuf et eau de cologne sur la peau fraichement rasee (ca arrache!!bis). E a un peu plus de mal a exprimer ce qu'il veut. Il commence par une taille de la barbe et garde la moustache, puis le barbier s'attaque a la toison capillaire, E passe par plusieurs etapes capillaires, c'est assez drole, et obtient finalement un resultat tres correct (les danoises le compareront a Orlando Bloom, c'est vous dire), entre temps, breve discussion avec le barbier qui nous offre un cafe entre deux coups de ciseaux et travaille la toison d'E la clope au bec, avec beaucoup de clase et de professionnalisme.
Ces operations nous ont pris un certain temps et il ne nous reste que peu de temps pour internet. On passe qund meme au cyber pour une consultation rapide des mails, des comptes et news de France et du Monde.
Retour a Al-Ma'asara ou les copains nous attendent en jouant aux echecs et en lisant.
Vers 18h, Ahmed et son taxi debarquent et nous amene a Hebron, avec Mahmoud, 20 kilometres au sud de Ma'asara. Vous devez etre nombreux a connaitre la situation a Hebron, je l'avais deja decrite l'an passe. En quelques lignes, Hebron, Al-Khalil en arabe, abrite le tombeau des Patriarches, ou reposent les grands prophetes Abraham, Isaac et Jacob, communs aux trois grandes religions monotheistes. C'est donc un lieu de pelerinage pour Juifs, Musulmans et Chretiens. C'est une ville qui a toujours ete le theatre des plus violents affrontements entre les plus extremistes de chaque bord. En 1929, 60 juifs sont massacres par les palestiniens et la communaute juive est exclue d'Hebron. Peu apres 1967 (guerre des 6 jours et controle militaire et administratif de la Cisjordanie par Israel), une communaute s'installe dans la colonie de Kiryat Arba, dans l'est de la ville. Quelques centaines d'extremistes sionistes se sont depuis installe dans la vieille ville, occupant les etages et les toits du souk, proteges par la police militaire, et exercant mille pressions sur leurs voisins palestiniens pour les en chasser du centre (delogements, assassinats, expulsions sauvages, vidages de commerces...). Les affrontements et couvres-feux sont reguliers, notamment lors des intifadas. En 1994, un docteur americain, Baruch Goldstein massacre 29 musulmans en priere dans la Mosquee El-Ibrahim. Le crime est condamne par le gouvernement israelien mais un monument a la gloire du meurtrier est erige a Hebron.
On se balade dans le souk de la vieille ville qui se vide en fin d'apres-midi. Grillage au-dessus du souk pour proteger les passants palestiniens des projectiles lances par les colons, barbeles, miradors, et drapeaux israeliens couvrent les hauteurs des batiments. Un autochtone nous fait monter sur son toit et nous montre les maisons et terrains de jeux de ses voisins colons, belles baraques protegees par des grillages et barbeles, a quelques metres seulement, comme imbriques avec les logements palestiniens, comme chien et chat vivant separement et se haissant mais partageant le meme panier, dans une proximite brulante et explosive. En contre-bas, de jeunes colons jouent sur un terrain de basket encadre de grillages, surveilles d'un oeil par leur mere.
Un soldat qui nous voit observer la situation et prendre des photos nous interpelle en nous demandant de partir. On redescend et on s'enfonce dans les ruelles de la vieille ville jusqu'au triple point de controle donnant l'acces (ou pas) a la Mosquee El-Ibrahim (voisine de la Synagogue sur le site du tombeau des patriarches). Controle d'identite, detection de metaux, on arrive a la Mosquee. CH et A doivent se couvrir d'une cape-capuchon. Un gardien nous fait la visite. La mosquee est vraiment belle, et tres ancienne. On voit les tombeaux symboliques des prophetes et l'urne de leurs cendres presumees. On voit aussi les impacts de balle du massacre de 1994. Des cameras et des micros israeliens enregistrent bruits et mouvements a chaque coin de la salle de priere.
On sort et je reste avec Mahmoud Moussa pour prendre le the et discuter chez un commercant tandis que les autres vont visiter la synagogue attenante a la Mosquee, accessible de l'autre cote. J'observe le site du tombeau des patriarches, le passage de colons israeliens et de familles musulmanes dans la rue, la releve de soldats au check-point... Je demande au marchand comment il peut vivre dans cette situation de tension, il me dit qu'ils survivent et ne sait pas jusqu'a quand ils en seront capables. De retour, les copains font quelques achats de keffiehs, poteries, tissus, on boit un the et on prend une photo avec le proprio, tres gentil.
On repart en sens inverse, harceles par de jeunes vendeurs palestiniens qui veulent nous refourguer porte-cles ou bracelets. On sent de la tension et de l'agressivite chez tout le monde, soldats, palestiniens, colons, cristallisees autour de cette configuration socio-geographique dementielle. Deuxieme claque, quand bien meme TF et moi savions a quoi nous attendre, semblable a celle de Ni'lin la veille, quand on essaye de realiser dans quel monde et quel quotidien ces gens vivent, et que le corps et l'esprit, par instinct de protection, te commandent inconsciemment de deguerpir de cette bulle etouffante de haine et d'hostilite. On rejoint Ahmed et ses potes dans un bar a chicha, on y reste un peu puis on repart pour le village ou l'on est attendus pour un barbecue prepare pour les internationaux , zappant malheureusement le passage au camp de refugie Al-Arub ou vit Tasneem (la veuve de Qaher), entre Hebron et Al-Massara. A nouveau, Ahmed adoucit l'ambiance et change le ton en envoyant un suave tube de Mariah Carey.
Barbecue a la Maison des Internationaux, avec les danoises, les anglaises, Marouane qui anime le repas de sa verve intarissable, Jumah, Mahmoud, Ahmed, Abu Zeid et quelques autres.
Pas de boulot ce soir, on va a la piscine le lendemain. On finit donc autour d'une chicha sur le toit des Moussa.
Mardi 20 juillet
C'est piscine aujourd'hui, pour les enfants, autant dire le temps fort du camp d'ete a ne rater sous aucun pretexte car unique occasion dans l'annee d'y aller.
Autres signes des changements operes par Rezik, les filles viennent aussi alors qu'elles n'avaient pas pu venir l'an passe, autre chose, la ponctualite de Rezik, quand nous attendions une heure avant de partir l'an passe, le bus est parti a 9h petantes et m'aurait laisse a Al-Massara si les gars ne lui avaient pas demande de m'attendre.
On part en deux bus, un grand pour tout le monde et un autre mini pour les gamins les plus penibles (les ados principalement). Sur le chemin de la piscine, a Bethleem, on apercoit le passage vers Jerusalem reserve aux israeliens et jerusalemites, et un peu au -dessus, le trace du mur qui se poursuit:
C'est une journee tranquille pour nous, les enfants se gerent en autonomie dans ce grand parc avec differents bassins et espaces verts. Les enfants sont dans l'eau du debut a la fin, ne voulant perdre une seule goutte, si ce n'est peut-etre pour manger leur casse-croute prepare par les mamans ou achetes sur place et partages entre fratries. En dehors de quelques surveillants de baignade, la notion de securite n'existe pas. Toboggans dangereux, sans fond a la reception et emprunte a double sens, jeux dangereux permis, barreaux sous l'eau entre les bassins... Heureusement, moins de blesses que l'an passe. On squatte a l'ombre, discutant avec les animateurs, buvant et mangeant, bronzant (pour CH et l'immacule CL), on se baigne avec les enfants qui ne savent generalement pas nager et nous demandent toute sorte d'action aquatique. Une brasse, un poirier ou une pirouette sous l'eau declenchent un tonnerre d'aplaudissement. C'est sympa de partager ce temps-la, en dehors d'Al-Massara et des classes avec eux. CH et A doivent se baigner en T.shirt et pareos et se font meme sortir un moment par un maitre-nageur. Les seules filles en maillot de bain sont effectivement peu nombreuses et toutes prepuberes. La joie des enfants fait en tout cas plaisir a voir et ce break-detente nous fait du bien a nous aussi.
Le bus nous laisse a Bethleem ou CL achete des ballons de baudruche pour son atelier-cirque du lendemain tandis que TF et CH repartent pour faire leurs adieux et prendre leurs bagages. On croise Mahmoud Moussa, une session internet, un peu de blog et on retrouve les tourtereaux au Cesar, le bar panoramique. Dernier verre ensemble, on est rejoints par Ahmed qui nous invite a manger chez lui ce soir. TF et CH prennent ensuite un tacos pour le check-point de Gilo, nuit et sejour a Jerusalem pour eux. Au-revoirs et retour en taxi-bus a Massara apres une appreciable pause sandwich falafel.
On se retrouve a 4, CL qui se retrouve seul passe a l'activite cirque, je reste sur le francais, A et E sur le theatre. On bosse un brin, on se repose et on retrouve Ahmed le taxi chez lui, a quelques metres au-dessus du centre. Sa femme, adorable et souriante, nous accueille avec lui, on s'attable directement devant d'immenses plats de feuilles de vigne, rejoints par les trois danoises avec qui le lien commence a se faire. Le diner est succulent, fruit de plusieurs heures de preparation ( enrouler riz et viande dans des feuilles de vigne) et c'est un plaisir de voir Ahmed et sa famille chez lui (on decouvre que des enfants que l'on a en classe sont les siens). Conversations, cafes et thes au petits soins de nos hotes attentifs et chaleureux. On decide avec Akhmed d'aeller a Jericho le lendemain.
On termine chez les Moussa, ou l'on retrouve Mohamed, un des piliers de la resistance d'Al-Massara, rencontre l'an passe. Plaisir de retrouver ce sosie de Che Guevara, passionne d'histoire, d'art et de philosophie, prof d'arabe a la fac et responsable du comite du parti communiste a Bethleem. Il propose de nous accompagner a Jericho le lendemain. Dodo, vers 1h, lessives par la piscine. CH et TF sont bien arrives a la Maison d'abraham a Jeru, ou ils accusent un bon coup de cafard.
TG
Je pars retrouver les autres, en sieste depuis le retour de leur ecursion nocturne du Mont Sinai. On va essayer de se faire une plongee en bouteille si le temps le permet, on part pour Le Caire demain midi.